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Chronique d'une mort annoncée / Garcia Marquez, Gabriel

Librairie Générale Française, 1998 .- 115 p. .- (Livre de poche, 6409) .-
Isbn 978-2-253-04397-3
Garcia Marquez, Gabriel .- Chronique d'une mort annoncée
Garcia Marquez, Gabriel

 

Garcia Marquez

Pour vous y retrouver, une chronologie à compléter

 

Résumé : Au début du siècle, dans un village de la côte caraïbe de la Colombie, les frères Vicario ont annoncé à tous ceux qu’ils ont rencontrés, sauf à Santiago Nasar, leur intention de le tuer. On venait de célébrer le mariage de leur sœur, mais son époux, l’ayant trouvée déflorée, l’avait aussitôt répudiée. Elle accusa Santiago Nasar, un homme de belle prestance, et il faut que l'honneur de la famille soit lavé dans le sang. Après avoir a passé la nuit avec les derniers fêtards d’un mariage et être allé au port, comme une grande partie des villageois, accueillir l’évêque dont le passage constitue un événement, Santiago est, à l’aube, sauvagement poignardé devant sa porte. Pourquoi le crime n’a-t-il pu être évité? Les uns n’ont rien fait, parce qu’ils croyaient à une simple fanfaronnade d’ivrognes. D’autres ont tenté d’agir, mais un enchevêtrement complexe de contretemps et d’imprévus, souvent joyeusement burlesques, et aussi l’ingénuité ou la rancoeur et les sentiments contradictoires d’une population vivant en vase clos sous un climat tropical, ont permis et même facilité la volonté aveugle du destin. L’atroce assassinat se double d’une immonde autopsie faite par le curé, autrefois étudiant en médecine : l’horreur est telle que le colonel-maire, pourtant aguerri par une vie de répressions, en devient à tout jamais végétarien. La mort envahit toute le village, comme le nuage brun qui glisse sur le cadavre en voie de putréfaction. L’odeur de Santiago est partout, sur les mains de ses bourreaux comme sur le corps de la putain dont il habitait le grand coeur. Le procès fleuve de ce crime se perd dans des dossiers innombrables qui flottent dans l’eau des marées qui envahissent le palais de justice. Les frères vengeurs sont en prison et ne peuvent pas fermer l’oeil. Vingt ans après, leur soeur retrouve l’amour de son mari revenu : pour lui, elle est redevenue vierge.
Commentaires : à la fin....

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1, le jour où il allait être abattu : pp. 9-28
01
Où doit aller travailler Santiago après la venue de l'évêque ?  
02
Pourquoi Victoria Guzman est-elle devenue domestique au service du père de Santiago ?  
2, Bayardo San Roman, l'homme qui avait répudié son épouse : pp. 29-50
03
Qu'a demandé Bayardo à Angela lors de la kermesse où Angela chantait les lots?  
04
Pourquoi la famille d'Angela lui impose-t-elle de se marier ?  
05
Quelle a été la plus grande joie de Santiago lors de la noce ?  
3, l'avocat plaida la thèse de l'homicide : pp. 51-72
06
Les jumeaux étaient-ils réellement en état de légitime défense ? Pourquoi ?  
07
Plusieurs fois, des personnes demandent aux jumeaux pourquoi ils veulent tuer Santiago. Que répondent-ils à chaque fois ?  
08
Pourquoi Clotilda Armenda est-elle déçue que le colonel Aponte ne coffre pas les jumeaux ?  
09
Qui Clotilda Armenda fait-elle avertir du danger encouru par Santiago ?  
4, les plaies provoquées par les couteaux : pp. 73-94
10
Pourquoi le père Amador conclue-t-il, en observant le foie, qu'il ne restait que peu d'années à vivre à Santiago? En quoi est-ce une erreur ?  
11
Pourquoi le narrateur pense-t-il que Santiago Nasar n'est pas le coupable ?  
12
Pourquoi Angela laisse-t-elle Bayardo découvrir qu'elle n'est pas vierge ?  
5, Durant des années, nous fûmes incapables de parler d'autre chose : pp. 95-116
13
Prévenu par Ismaël Shaium, Cristo Bedoya cherche Santiago. Par où rentre-t-il dans la maison de Santiago ?  
14
Flora Miguel a appris que les jumeaux veulent tuer Santiago. Qu'est ce qui va se passer selon elle ?  
15
Pourquoi Placida Linero pense-t-elle que Santiago est dans sa chambre quand elle entend frapper contre la porte ?  
Dans la colonne de droite, noter la page où vous avez trouvé la réponse. Répondez avec précision aux questions en faisant des phrases. Attention à l'orthographe.

 

Commentaires :
Garcia Marquez a révélé : «Le point de départ de ce roman remonte à trente ans. C’est un événement réel, un assassinat qui eut lieu dans un village de Colombie. Je fus très près des acteurs du drame en un moment où j'avais écrit quelques nouvelles, mais je n'avais pas encore publié mon premier roman. Je me rendis compte immédiatement que j'avais entre les mains un matériel extrêmement important. Mais ma mère l'apprit et, pensant que j'allais écrire un reportage, me demanda de ne pas le faire tant que seraient en vie certains de ses protagonistes dont elle me cita les noms. Je renonçai. Je pensai alors que le drame était terminé, mais il continua à évoluer, et des choses se produisirent à la suite. Si je l'avais écrit en ce temps-là, il y aurait manqué une grande quantité d'éléments essentiels pour mieux comprendre l'histoire. Je me suis décidé à l'écrire après “L'automne du patriarche”, quand moururent ces protagonistes cités par ma mère. Il est intéressant de voir maintenant que le roman qui est issu de cette réalité n'a rien à voir avec elle. J’ai utilisé une technique de reportage, mais, dans le roman, il ne reste du drame lui-même ou des personnages que le point de départ, la structure. Les personnages ne portent pas. leur vrai nom et la description ne correspond pas à l'endroit. Tout est transposé poétiquement. Les seuls à conserver leur nom sont les membres de ma famille, encore m'avaient-ils autorisé à le faire. Naturellement, des personnages vont s'y reconnaître, mais ce qui m'intéresse et doit, à mon sens, intéresser, c'est la comparaison entre la réalité et l'œuvre littéraire.»
Ce point de départ pourrait faire passer le roman pour le récit d'un fait divers, pour une histoire policière bien qu'il n'y ait pas de police. Cette histoire de crime est, en effet, structurée presque comme un roman policier : elle est fort courte, très dense et a un déroulement très rigoureux. Garcia Marquez se promène dans ce récit, à des années de distance, rencontre l'un, revoit l'autre, interroge, écoute, prend des notes, fait des recoupements, se souvient à son tour comme un témoin quelconque de cette affreuse histoire d'un crime d'honneur.
Mais cette œuvre singulière peut plutôt être vue comme une tragédie grecque sur les thèmes de l’honneur et de la fatalité : l'inéluctable mécanique d’un destin aussi impitoyable que capricieux accable dès les premières pages un beau jeune homme innocent marqué par le sort, promis à la mort, dont la foule, le chœur, chuchote l'imminence, et qui ne le sait pas. La mort est tombée sur la tête de Nasar comme la fiente des oiseaux dans ce songe initial et funeste que sa mère, pourtant experte à éclairer tous les rêves du village, ne sut pas déchiffrer. De plus, le mystère reste entier : on ne saura jamais si Santiago Nasar fut vraiment l'amant secret de celle qui se présenta à son époux comme une pure jeune fille.
Avec cette histoire qui ressortit profondément à son patrimoine, Garcia Marquez plongea dans un monde archaïque où le code de l'honneur a l'épouvantable force des Tables de la Loi. Cependant, il ne faut pas chercher quelque explication sociologique : il n'y a ici nul conflit de classes, ni de race, même si le héros est petit-fils d'immigrant arabe : sur la côte colombienne comme, en général, dans une Amérique latine vouée au métissage, cela n'a strictement aucune importance. Il suffit qu'il soit de belle prestance. De même, foin d'un quelconque symbolisme, de toute glose qui chercherait à discerner quelque vérité transcendante, un message supérieur, toutes choses dont l'auteur n'a cure. Il ne fait que montrer une autre manifestation de la violence : «La violence est le sujet de tous mes livres. La violence en Amérique latine a toujours existé ; elle vient d'Espagne ; elle est la grande accoucheuse de notre histoire.»
En fait, seul le regard importe, seule l'écriture compte. La vertu majeure du livre est le talent du conteur, son désir de conter et de séduire par un regard empathique, truculent, poignant. Il a ainsi écrit un livre hallucinant où son humour et son imagination se débridèrent plus que jamais.
Il a déclaré : «C'est mon meilleur roman, celui que j'ai pu le mieux maîtriser», au quotidien espagnol ‘’El pais’’, le 1er mai 1981 à Mexico, le jour même où l'on mettait le roman en vente simultanément à Bogota, Barcelone et Buenos Aires, avec un premier tirage de deux millions d’exemplaires vendus non seulement dans les librairies mais les kiosques et les supermarchés. Ainsi, les ventes de l’édition espagnole ont-elles dépassé celles de ‘’Cent ans de solitude’’.
Il y écrivait : «Les conservateurs (los godos) vont à la messe de 5 h, les libéraux (los cachiporos) vont à l’église à 7 h.»

André Durand présente Gabriel GARCIA MARQUEZ in www.comptoirlitteraire.com